La Toute-Bonne : à manger ou soigner avec abstinence…

Symphytum officinale L.

 

 

 

La Grande Consoude porte bien son surnom de Toute-Bonne, tant ses vertus sont multiples et controversées. Le terme de "consoude", apparu vers 1265, vient du bas latin consolida, en raison de ses vertus à consolider des fractures. Sa teneur en allantoïne et sa richesse en calcium, accélèrent la formation de nouvelles cellules, aussi bien dans la peau que dans des masses osseuses en favorisant la guérison de fractures.

Le terme de Symphytum, vient du nom d'une plante aux propriétés cicatrisantes. Si la consoude n'est pas un antiseptique au sens actuel du mot, il est un inhibiteur de la croissance bactérienne, ce qui a permis autrefois de soigner les plaies suppurantes ou les escarres, soulager les brûlures du premier degré, calmer et cicatriser les gerçures des seins. De plus, sa richesse en tanins et mucilages lui confère des propriétés astringentes, émollientes et hémostatiques. Par contre, les allégations sur sa propre synthèse de vitamine B12 (favorisant le renouvellement des globules rouges et la croissance) s’explique plutôt par une régulation, lors de l’ingestion de la plante, des bactéries de la flore intestinale capable de synthétiser cette vitamine.

Derrière ces usages mirifiques, se cache une alchimie moderne avec ses noms barbares : lycopsamine, intermédine, héliosupine, symphytine et surtout l’échimidine qui sont … des alcaloïdes plus ou moins toxiques et qui peuvent conduire à une cirrhose du foie. Comme toutes choses, c’est une question de dosage et à proscrire chez les enfants de moins de 6 ans, les femmes enceintes, les personnes âgées.

Toutefois, si vous avez, récemment mangé en Allemagne des beignets de feuilles d’Arznei-Beinwell, en Angleterre un ragoût de mouton aromatisé à la Comfrey pour ses vertus digestives, en France de jeunes pousses blanchies comme des asperges, le tout arrosé de vin de consoude, vous devez être encore en capacité de nous raconter vos pérégrinations gastronomiques. En effet, les quantités de substances toxiques contenues dans la Consoude officinale, le sont en très faible quantité et principalement dans les racines. Le véritable risque ne réside donc pas dans la consommation occasionnelle, mais dans une réelle addiction à la Consoude !

Une intoxication alimentaire est certainement plus probable si vous la confondez avec l’empoisonneuse Digitale Pourpre (Digitalis purpurea L.) dont les feuilles sont de formes similaires : épaisses, lancéolées, longues de 40 cm sur de 15 cm de large. Pour différencier la Langue de Vache ou Oreille d'âne (autres noms évocateurs de la Consoude), observez le limbe des feuilles qui se prolonge longuement formant des angles ailés et des poils rudes. Si vous avez un moindre doute, mieux vaut confirmer votre détermination avec la floraison : une grappe terminale de fleurs enroulées comme une queue de scorpion. Chaque fleur à la forme d’un tube allongé terminé par 5 dents courtes, variant du rouge violacé au blanc jaunâtre. Bien qu’inodore, les Consoudes sont des plantes à haut potentiel nectarifère. Les fleurs sont systématiquement visitées par les bourdons en raison de leur haute attractivité. Ceux-ci percent généralement un trou à la base de la corolle afin d'accéder plus rapidement au nectar. Les abeilles peuvent ensuite en profiter. Sans ce trou, leur langue est trop courte et ne permet d'accéder qu’au pollen.

Native d’Europe du Sud sans être une plante méditerranéenne, elle est répartie dans une grande partie du Nord de l’Europe où elle s’adapte très bien à tous types de sols et d’expositions au point d’en devenir rapidement envahissante. Elle a parfois été introduite pour ses propriétés tinctoriales pour la laine. La teinte obtenue dépend du mordant utilisé permettant d’avoir des teintes allant du jaune au brun.

Pour la trouver, suivez l’Ecaille Marbrée Rouge, un papillon dont sa chenille se nourrit entre autre de ses feuilles. Arrivé à destination, vous serez probablement dans une prairie humide, au bord de cours d’eau, dans un fossé ou tout autre habitat présentant un sol humide, riche en substances nutritives. Parfois, elle est cultivée dans les jardins, soit à des fins culinaires, soit pour en fabriquer un purin servant à accroître la fertilité du sol et la croissance des plantes. Du fait de sa teneur en protéines supérieure ou égale à celle de bien des légumineuses fourragères, elle est aussi cultivée comme un très bon complément alimentaire pour les volailles et les porcs.

Pour clore cet article et vous aider à bien choisir parmi les multiples bienfaits de la Consoude, voici un conte du Moyen-âge qui met en évidence ses vertus astringentes. Il rapporte qu'une jeune servante, la veille de son mariage, s'était préparé un bain avec une forte décoction de consoude afin de retrouver sa virginité déjà consumée; or, ayant omis de tenir sa maîtresse au courant du but essentiel de cette opération, la vieille maîtresse de maison se plongea dans le même bain - l'eau était rare à l'époque! - et obtint un tel résultat que son vieux mari «ne fut pas médiocrement surpris de lui trouver une virginité nouvelle »… !